À la découverte de la province

Article du 02 avril 2025 au 04 avril 2025

Changhua City

Nous sortons enfin de notre grotte, car aujourd’hui, nous allons retrouver notre ami dans sa ville d’enfance. Pour nous y rendre, nous empruntons le train à grande vitesse taïwanais.

Dans la gare, nous reprenons les habitudes que nous avions au Japon. Tout est clair et simple, et nous trouvons rapidement le quai ainsi que la file correspondant à notre numéro de voiture. En voyant le train arriver, nous remarquons qu’il ressemble à certains modèles de Shinkansen, et nous savons d’avance que le trajet sera agréable.

Nous arrivons à Taichung, où nous changeons pour un train local, avant de poursuivre jusqu’à Changhua. Là-bas, notre ami vient nous chercher en voiture, ce qui nous donne l’impression d’avoir notre propre chauffeur privé.

Lorsque nous nous sommes revus à Taipei, nous lui avions demandé ce que nous pouvions offrir à ses parents. Nous pensions offrir des fleurs à sa mère et du vin ou de l’alcool à son père. Cette idée a donné lieu à de grandes discussions et à un choc culturel. Nous avons appris que sa mère n’avait probablement jamais reçu de fleurs et qu’il est plus courant d’offrir des fruits lors des visites à des proches.

Malgré tout, nous avons décidé d’offrir des fleurs à sa mère pour la remercier de nous accueillir. Avant de nous rendre chez lui, nous passons chez un fleuriste. Mais l’endroit ressemble davantage à un grand jardin qu’à un magasin de fleurs. Nous cherchions un bouquet, mais il n’y en avait pas. Nous avons donc opté pour un pot d’orchidées, qui sont très courantes à Taïwan. Nous avons été surpris par la taille imposante de certains spécimens, présentés dans des pots gigantesques.

Nous arrivons chez Hsin. Il nous avait prévenus qu’il ne fallait pas trop faire attention à son père, mais nous nous attendions tout de même à ce que les présentations soient faites. Il y a donc eu un moment gênant lorsque nous nous sommes retrouvés face à lui, en attendant que notre ami intervienne, tandis que ce dernier attendait simplement qu’on lui dise bonjour. Sa mère, en revanche, était beaucoup plus expressive et nous a même impressionnés par son niveau d’anglais.

Notre ami nous fait visiter sa maison, ou plutôt son immeuble, comme il le dit lui-même. Selon lui, il habite à la campagne. Pourtant, il y a une gare, des supermarchés, les maisons sont sur plusieurs étages et il y a de la circulation. Cela ressemble peu à notre image de la campagne française, et nous avons plutôt l’impression d’être en ville, même si celle-ci est bien plus petite que la capitale ou d’autres grandes villes du pays. Il nous explique que les maisons à Taïwan sont généralement conçues ainsi. Ce qui ressemble à des immeubles est en réalité une seule propriété où toute une famille habite.

Au rez-de-chaussée, nous traversons le salon de coiffure de sa mère. La pièce adjacente sert de salon familial et de bureau. Au premier étage se trouvent notre chambre et la cuisine-salle à manger. Les deux étages supérieurs sont composés de chambres et de salles de bain. Récemment, ses parents ont ajouté un étage supplémentaire, qui sert actuellement de rangement et de salle de karaoké, une activité très populaire à Taïwan. Ils ont également une terrasse qui donne sur un cours d’eau et un terrain désaffecté. De là, nous pouvons voir une immense statue de Bouddha située dans la ville voisine.

Nous avons déjeuné tous ensemble autour d’une table équipée d’un plateau central tournant. Sa mère avait préparé plusieurs plats, et nous nous sommes régalés.

Ensuite, nous avons passé l’après-midi à Lukang. Hsin s’arrête dans un magasin pour acheter un bubble tea, une boisson originaire de Taïwan que tout le monde boit. Il s’agit d’un thé avec des billes comestibles, qui se déguste chaud ou froid, avec ou sans lait. En traduisant le menu, nous tombons sur une version au chocolat Valrhona. Nous n’en revenons pas, car nous sommes loin des sentiers touristiques, et ce n’est pas vraiment conventionnel, mais nous nous laissons tenter. Mav avait déjà goûté le bubble tea en Asie du Sud-Est sans être convaincu, mais cette version chocolatée est finalement plutôt bonne.

Nous poursuivons notre visite par un temple chinois historique dédié à Mazu, la déesse de la mer, l’une des divinités les plus vénérées à Taïwan. Son architecture colorée nous plaît, et des lanternes forment un plafond lumineux. Comme c’est la première fois que nous visitons un temple avec notre ami, nous en profitons pour lui poser plein de questions et en apprendre davantage sur le taoïsme, la religion majoritaire dans le pays.

Après cette visite, nous déambulons en ville. Nous passons plusieurs minutes dans un magasin de calligraphie. Hsin nous explique que chaque Taïwanais possède un tampon unique, doté d’une valeur juridique, qui accompagne la signature comme preuve d’identité. Même les entreprises en ont un, lors d’un rendez-vous, il est obligatoire de l’apporter, par exemple pour signer un contrat et valider le document.

À l’extérieur de la boutique, une table en pierre avec des pinceaux et de l’eau permet de s’essayer à la calligraphie. Hsin y écrit alors nos noms en caractères mandarins, et nous tentons, tant bien que mal, de les reproduire. À le voir faire, cela semble si facile et si beau, et pourtant, il nous assure qu’il n’est pas bon en calligraphie.

Nous continuons de nous balader dans les rues avant de rentrer chez Hsin. Le soir, nous ressortons pour aller au marché de nuit. En Asie, ces marchés rempli d’étales de nourritures parfois peu appétissantes visuellement ou olfactivement sont une tradition. Mav avait hâte de retrouver ces lieux de vie, mais ne s’attendait au côté fête foraine qu’il y a ici. Mêlés aux stands de nourriture, des stands de jeu permettent aux taïwanais de se divertir. À Taipei, nous avions remarqué que quelques gens nous regardait, mais depuis que nous avons quitté la capitale, et encore plus lors de cette sortie nocturne cela s’est un peu plus intensifié. Rien de méchant, car les gens sont plutôt souriants, ils sont plutôt surpris et semble se demander ce que nous faisons ici.

Hsin nous guide et décrypte les menus de chaque stand. Mav n’est pas très aventureuse, tandis que Clem se laisse tenter par des pieds de poulet désossés, un plat très populaire. Malheureusement, il ne s’attendait pas à ce que ce soit froid et les petits morceaux de cartilages ne sont pas très agréables. Lorsque nous passons dans les allées, parfois une odeur désagréable se fait sentir. Notre ami nous explique qu’il s’agit du tofu puant, un met très apprécié par les locaux mais qui nous n’essayons pas.
En guise de dessert, nous prenons des crêpes thaïlandaises, une meilleure version des crêpes selon notre ami taïwanais, ce qui nous a un peu choqué. Il s’agit simplement de crêpes mais cuites au point d’être croustillantes. Cependant, Mav a bien aimé et a même envie de revenir demain, ce qui est plutôt rare.

Promenade à Sun Moon Lake

Aujourd’hui est un jour férié à Taïwan, l’équivalent de la Toussaint. Les gens se rendent dans les cimetières pour nettoyer les tombes. C’est aussi le premier jour d’un week-end de quatre jours, et les Taïwanais en profitent pour partir en voyage. Hsin décide donc que nous partions tôt pour éviter au maximum les embouteillages.

Nous rencontrons William, de son nom anglais, plus simple pour nous. Beaucoup d’Asiatiques choisissent un prénom occidental pour faciliter les échanges avec les étrangers. Nous montons dans sa voiture, direction le Sun Moon Lake. Nous avions abandonné l’idée de visiter ce lieu, car sans voiture, il est difficilement accessible, en plein cœur de l’île. Nous sommes donc ravis de nous y rendre, d’autant plus que nous profitons du confort de sa voiture.

Après une heure et demie de route, nous arrivons face à un lac entouré de forêt. Pendant le trajet, nos amis nous avaient prévenus que ce n’était « qu’un lac » pour ne pas trop éveiller nos attentes, mais nous ne sommes pas du tout déçus. L’endroit est plutôt calme, surtout pour un jour férié avec un temps aussi clément. Nos amis nous expliquent qu’il y a quelques années, les lieux étaient bien plus animés, lorsque les touristes chinois étaient encore autorisés à entrer sur l’île. Aujourd’hui, ce sont majoritairement des touristes thaïlandais ou coréens qui viennent visiter.Nous nous trouvons au point le plus central de l’île.

En nous promenant, nous apercevons des membres des peuples aborigènes de Taïwan. Nous avons appris il y a quelques jours que Taïwan abritait une dizaine de tribus présentes avant les différentes colonisations. Leurs traits nous surprennent, car ils rappellent ceux des Maoris. Hsin nous explique qu’ils feraient partie des premiers habitants à avoir peuplé la Nouvelle-Zélande. Nous n’en avions jamais entendu parler, car chaque musée que nous avons visité indiquait que les premiers habitants de la Nouvelle-Zélande étaient originaires de Polynésie.

Nous louons des vélos et nous mettons en route pour longer le lac et profiter du panorama. En empruntant les quais, nous passons devant une personne qui propose de prendre des photos avec des suricates. Cela nous surprend, pour ne pas dire que cela nous choque un peu, mais nos amis locaux ne semblent pas du tout perturbés.

Un peu plus loin, nous tombons sur des singes en liberté qui nous observent depuis les rambardes. Ils ont tout de même l’air un peu agressifs, alors nous ne restons que le temps de prendre quelques photos et de les voir sauter de branche en branche avant de reprendre notre balade à vélo.

Après plusieurs semaines sans faire de sport, nos cuisses brûlent en montant vers le temple Wenwu. À peine arrivés, nous nous sentons tout petits. Ce temple, face au lac et gardé par deux statues géantes de lions, est immense. Nous prenons le temps de nous promener à l’intérieur et autour du temple pour profiter des points de vue et en apprendre davantage sur leur religion. Nous en profitons aussi pour discuter avec nos amis de géopolitique, notamment de la menace chinoise. Ils nous expliquent qu’en cas d’invasion, ce ne serait pas le service militaire obligatoire de trois mois qui leur permettrait de résister, mais plutôt l’intervention d’une coalition internationale.

Nous reprenons notre tour à vélo jusqu’au village situé sur la rive opposée à celle où nous avons loué nos vélos. Nous faisons une petite pause pour réfléchir à la suite du programme et décidons finalement de refaire le trajet en sens inverse, car la faim commence à se faire sentir et quelques nuages menaçants nous inquiètent.

Nous rendons les vélos, puis traversons les rues commerçantes à la recherche d’un endroit pour manger. Nous goûtons de l’alcool de millet, une céréale cultivée par les tribus locales. Sur les conseils du loueur de vélos, nous entrons dans un restaurant modeste. Il est un peu tard, et le service du midi est déjà terminé. Les employés ne s’attendaient visiblement pas à des clients : les lumières étaient éteintes et tout était rangé.

Pourtant, nous sommes chaleureusement accueillis, et cela ne semble pas les déranger de nous servir. Nous prenons place et commandons un menu à partager pour quatre. Peu à peu, les plats s’accumulent, et nous nous retrouvons face à un véritable festin. Nous dégustons des spécialités locales, comme du riz au millet, accompagné d’alcool de millet servi à volonté. Nous adoptons l’habitude de terminer le repas par une soupe pour nettoyer nos bols des éventuels grains de riz restants. Avant de reprendre la route, William nous offre un thé vert à emporter, une boisson indispensable à Taïwan.

Juste avant de partir, nous allons voir l’office du tourisme de la région, un bâtiment futuriste qui vaut le détour. Mav en profite pour faire une petite sieste pendant le trajet retour. Juste avant de rentrer, nous faisons un détour par Nantou City pour visiter le Guangming Village, là où le premier gouvernement taïwanais s’est installé après avoir quitté la Chine continental. Malheureusement, nous ne trouvons ni descriptif ni plaque commémorative. Nous nous contentons donc de faire le tour du village et discutons des tensions entre Taïwan et la Chine. Cela nous permet de mieux comprendre le conflit actuel. Nous échangeons sur leur vision, celle de leurs parents, ainsi que sur les tendances globales des Taïwanais.

Nous avons mangé tard et beaucoup, mais si nous rentrons maintenant, nous n’aurons pas le courage de ressortir. Alors, nous nous arrêtons au night market de la veille pour goûter ce que nous avions pas pu manger la première fois. William nous fait goûter un papaya milk, c’est un smoothie à la papaye et c’est assez exceptionnel, nous adorons instantanément. Cela rappelle à Mav les mango lassi qu’elle buvait régulièrement en Malaisie. Avant de partir, nous repassons par le stand de crêpes croustillantes, le vendeur la reconnait, et sa commande est déjà prête ce qui nous fait beaucoup rire. Fatigués par cette journée bien remplie, nous rentrons nous coucher.

Ludovico

Malheureusement, la nuit ne se passe pas très bien pour Clem. Il a très mal au ventre et fait des aller-retour entre le lit et les toilettes. Les sensations sont les mêmes que lorsqu’il mange du quinoa, ce que nous avons découvert en Nouvelle-Zélande. En se renseignant, la saponine semble désignée coupable. Le millet, le soja et le thé en contiennent tous et hier il en a consommé en grande quantité.

Heureusement, nous n’avions rien de prévu pour la journée, ce qui lui permet de se reposer et d’espérer aller mieux pour ce soir. En effet, nous devons faire un aller-retour à Taipei pour aller voir Ludovico Einaudi, un pianiste et compositeur italien en concert. Il est notamment connu pour ses musiques utilisées dans des films comme Intouchable. Hsin étant un fan absolu de l’artiste, il nous a proposé de l’accompagner et nous avons tout de suite accepter. Clem essaie de se reposer au maximum pour pouvoir profiter du mieux que possible ce soir.

À l’heure du départ, il se sent toujours brassé mais il trouve assez de force et courage pour prendre le train. Malheureusement, le train local à du retard et nous loupons notre correspondance pour le train à grande vitesse. Heureusement, cela arrive assez fréquemment et nous pouvons prendre le train suivant dans le wagon sans réservation. Hsin arrive même à trouver des places assises, ce qui ne nous déplaît pas.

Nous arrivons devant la salle de concert, que nous avions déjà vu la semaine dernière. Cette fois-ci nous découvrons l’intérieur, tout aussi beau. Lorsque nous nous installons, nous découvrons que nous sommes au premier rang, quasiment au milieu. Nous ne pouvions pas rêver mieux, l’excitation est à son comble.

Les deux heures sont passés en quelques instants, nous avons eu des frissons tout du long, et Hsin et Mav ont même pleurés, nous sommes sortis enchantés, comme si nous étions dans un rêve. Tout était beau, chaque moment était magique. A la sortie, Hsin nous avouera avoir réalisé un rêve ce soir et nous sommes heureux d’avoir partagé cela avec lui.
D’une simple conversation sur la musique d’Intouchable, dans une station de ski en Nouvelle-Zélande, nous n’imaginions pas que nous vivrions ce moment ensemble.

Sur le chemin retour, nous achetons quelques plats dans un convenience store en guide de repas. Clem se contente de riz blanc mais se sent déjà un peu mieux.

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